La poussée de la gauche contrecarre l'extrême droite aux élections françaises


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La France se dirigeait vers un parlement sans majorité absolue et des négociations difficiles pour former un gouvernement après qu'une victoire inattendue de la gauche ait contrecarré les efforts de Marine Le Pen pour porter l'extrême droite au pouvoir.

Alors que presque tous les votes ont été comptés dimanche, le bloc de gauche du Nouveau Front Populaire (NFP) a remporté le plus grand nombre de sièges lors de ces élections anticipées à enjeux élevés, un coup dur pour le parti du Rassemblement national de Le Pen, qui avait vu une majorité parlementaire à portée de main.

Ce résultat représente un succès retentissant pour la stratégie coordonnée anti-RN, dans le cadre de laquelle les partis de gauche et du centre ont tactiquement retiré leurs candidats des scrutins de second tour.

Mais ce résultat laissera la deuxième économie de la zone euro dans l'incertitude quant à son prochain gouvernement, aucun bloc ne parvenant à obtenir une majorité absolue à l'Assemblée nationale, qui compte 577 sièges.

Avec presque tous les résultats des circonscriptions connus, le NFP avait a obtenu 179 siègessuivi par l'alliance centriste du président Emmanuel Macron avec 157 sièges, selon le suivi des élections parlementaires du Financial Times. Ensemble disposait d'environ 250 sièges à l'Assemblée nationale sortante.

Pendant ce temps, le parti de Le Pen a été poussé à la troisième place par la tactique connue sous le nom de Front républicain, obtenant 143 sièges. Il s'agit toutefois d'une augmentation significative par rapport aux 88 députés dont elle disposait lors de l'assemblée précédente.

Le président français Emmanuel Macron a pris un risque en organisant des élections législatives anticipées © Mohammed Badra/Pool/AFP via Getty Images

Des cris d'horreur ont été entendus et des larmes ont coulé lors du principal rassemblement électoral du RN alors que les premières estimations des résultats par les sondeurs sont arrivées dimanche.

Marine Le Pen a cependant déclaré que la victoire de son parti n'avait été que « retardée » et que la « marée montante » de l'extrême droite.

Jean-Luc Mélenchon, l'anticapitaliste et leader de l'extrême gauche La France Insoumise (LFI) au sein du NFP, a adopté un ton combatif, appelant Macron à nommer un Premier ministre de gauche.

« Le président a le pouvoir, le devoir, d'appeler le Nouveau Front Populaire à gouverner », a-t-il déclaré, s'engageant à appliquer le programme NFP, à forte fiscalité et à fortes dépenses, qui a effrayé les investisseurs.

« La volonté du peuple doit être strictement respectée (…) La défaite du président et de sa coalition est confirmée », a déclaré M. Mélenchon.

Formé à la hâte après l'appel de Macron à des élections anticipées le mois dernier, le NFP comprend également le Parti socialiste (PS) centriste, les communistes et les Verts.

Les résultats annoncés ont été accueillis avec joie lors d'un rassemblement électoral du PS à Belleville, à Paris, au son des slogans « front populaire » et d'une gorgée de La Marseillaise.

« C'est génial ! Bien sûr que c'est génial », a déclaré au Financial Times Nicolas Mayer-Rossignol, maire PS de Rouen et figure de proue du parti.

Le programme économique du NFP constituerait une rupture majeure avec le programme favorable aux entreprises et le zèle de Macron en matière de réduction des impôts.

L'euro a chuté de 0,3% face au dollar après que les projections ont suggéré que la gauche avait remporté le plus grand nombre de sièges au parlement.

Marine Le Pen avait exprimé de grands espoirs pour le RN lors des élections © Yoan Valat/EPA-EFE/Shutterstock

La France se dirige vers une période d'incertitude politique qui aura des répercussions à la fois sur la France et sur l'UE, étant donné le rôle disproportionné de Paris dans l'influence de la politique du bloc, aux côtés de l'Allemagne.

Dans le système français, le président choisit le Premier ministre, qui est généralement issu du parti disposant de la plus grande délégation à l'Assemblée nationale, même s'il ne dispose pas de la majorité absolue.

Le Premier ministre français Gabriel Attal, qui a pris ses fonctions en janvier et a dirigé la campagne Ensemble, a déclaré qu'il démissionnerait lundi mais qu'il continuerait à assurer l'intérim aussi longtemps que nécessaire.

Bien que Mélenchon se positionne pour devenir Premier ministre, d'autres factions du NFP se sont fermement opposées à l'idée et briguent également le poste.

Macron et ses alliés ont exclu de former un gouvernement avec LFI ou RN.

Les responsables d'Ensemble vont plutôt tendre la main aux modérés au sein du NFP, comme les socialistes et les verts, et aux conservateurs Les Républicains, pour évaluer l'intérêt de travailler ensemble, a déclaré un responsable de l'Elysée.

Toutefois, parvenir à un tel accord pourrait s’avérer difficile étant donné les divergences entre les parties.

Un dernier recours serait de nommer un gouvernement technocratique dirigé par une personnalité expérimentée mais non partisane, même si cela n’est pas du tout dans la tradition politique française.

Même si les résultats sont bien meilleurs que prévu pour Macron, son autorité sortira tout de même affaiblie du scrutin.

Macron a pris le risque en juin d'appeler à des élections anticipées après que son alliance centriste Ensemble ait été battue par le RN de Le Pen aux élections parlementaires européennes.

Le président a défendu cette décision, qui a stupéfié et provoqué la colère de nombreux citoyens, même dans son propre camp, comme un moment nécessaire de « clarification ».

Bernard Sananes, directeur de l'institut de sondage Elabe, a déclaré que les résultats représentaient une “victoire” des partis centristes et de gauche formant un “front républicain”, affirmant que la participation avait augmenté dans les courses importantes contre l'extrême droite.